samedi 17 octobre 2009

Numquamne familia mea quieta erit ? /episode 2

Ce matin-là, c'était le 18 mai, il pleuvait des chiens et des chats. Betty a déposé Quentin à l'école et Valérie au collège sans presque s'en rendre compte tant elle était préoccupée. Elle est arrivée très en avance à l'aéroport, le temps de lire le quotidien, de boire un café, de vérifier quatre fois son maquillage dans le miroir des toilettes, d'acheter à la boutique un chiot en peluche et un tube de rose à lèvres ultra brillant au cas où sa marraine aurait oublié de prévoir un cadeau pour les enfants, et une bouteille de whisky pour son mari... au cas où... on ne sait jamais, on n'est jamais torp prévoyant... Betty pensait toujours à tout, tout le temps ; du coup, sa famille se dispensait souvent de penser, tout court. Cette redoutable organisatrice préparait les affaires de chacun le soir, les mettait dans la voiture, beurrait les tartines, mettait le sucre dans le café qu'elle tournait, prémâchait tout, sauf le steak.

A 8h55, l'écran a enfin affiché la terrible nouvelle : l'avion avait atterri, un vol sans avaries, avec à son bord Marie, qui, si souvent femme varie, ne variait que d'apparence, mais fréquemment.

Betty s'était imaginé mille visages, mille accoutrements les plus impossibles les uns que les autres et en secret elle avait prié pour que sa tante arrive incognito, se fondant dans la masse des autres mortels du vol AF 687.
Elle-même se tenait un peu en retrait de la foule qui attend toujours aux arrivées d'avions. Chaque fois que la porte s'ouvrait, elle se haussait un peu sur la pointe de ses ballerines, tendait le cou, levait le nez, prête à lever le bras en direction du nouvel arrivé puis elle laissait tout retomber, sauf le sourire qu'elle s'était accroché au visage.
- Betty ! Bonjour ! Vous attendez quelqu'un ? ça fait un bail qu'on ne s'est pas vu ! depuis le dîner chez les Matthieu, je crois. Comment allez-vous ?
Betty se retourna vivement. Elle avait en face d'elle le nouveau DRH de BioSanté, collègue et ami récent de son mari. Tout en priant pour que Mary ne débarque pas à ce moment-là, elle répondit qu'elle attendait sa vieille tante malade. Et comme les vieilles tantes malades n'intéressent pas les DRH blonds au sourire pepsodent, le Jean-Pierre formula une politesse quelconque et s'en alla voir ailleurs si Betty n'y était pas.

Comme Betty vérifiait que l'importun s'éloignait bien, elle se fit brusquement prendre par la taille et sa joue reçue une bise magistrale. Elle ne l'avait pas vue arriver.
Elle était aussi grande que dans ses souvenirs, toujours aussi blonde et terriblement jeune. Ses cheveux lui descendaient plus bas que sa jupe léopard et sa frange soulignait ses grand yeux noirs. Son sourire laissait briller un diamant incrusté dans son incisive. Eblouie, Betty baissa les yeux et découvrit de vertigineux escarpins vernis. Finalement, elle s'était fait des idées, Marie n'était pas si excentrique que sa filleule l'avait craint.

Lorsqu'elle retrouva l'usage de la parole, Betty lui fit les politesses et voeux de bienvenue d'usage et l'embarqua dans son monospace de mère de famille.

A SUIVRE ...




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